Journal d'un homme des bois, 26 septembre 2016

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Où notre Homme des bois patate (du verbe patater)…

Septembre touche à sa fin et voici venu le temps de nettoyer le jardin. Cette semaine, nous avons commencé à réorganiser les bacs à plantation, en commençant par celui des pommes de terre.

Nous avons une manière bien à nous de cultiver les pommes de terre ! À la sortie de l’hiver, après avoir choisi un endroit qui nous semble bien exposé, nous posons à même le sol des parpaings en série, afin de délimiter un espace rectangulaire de trois mètres de long (six parpaings alignés) sur environ un mètre de large (deux parpaings). Cela nécessite donc seize parpaings. Nous utilisons les plus larges (20 cm) qui sont bien stables. En mars/avril, nous posons à l’intérieur de cet espace, sur deux lignes espacées de trente centimètres, des pommes de terre germées, à raison d’une tous les trente centimètres, et ce directement sur le sol. Ce qui fait en tout dix-huit plants. Nous recouvrons immédiatement chaque pomme de terre d’une pelletée de terre. Une tige portant quelques feuilles ne tarde pas à émerger. Au fur et à mesure de sa croissance, nous continuons de la recouvrir en ne laissant à la lumière que son extrémité. Désormais, nous n’utiliserons plus de terre mais du broyat, c’est-à-dire des branchages provenant de la taille des haies, des arbustes, des arbres fruitiers et des bambous, que nous passons au broyeur.

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Au bout de deux ou trois semaines, il est nécessaire de surélever le bac avec une seconde ligne de parpaings, tout en bouchant les trous entre les plants avec du broyat. Une troisième ligne est bientôt nécessaire ! Nous obtenons alors un bac de soixante centimètres de hauteur, entièrement rempli de broyat, à l’occasion complété par des tontes d’herbe. Refaire le niveau est le seul travail nécessaire – nous n’arrosons jamais et il n’y a rien à désherber car rien venu du sol d’origine ne peut traverser 60 cm de broyat, pas même le chiendent.

Les tiges des plants de pomme terre continuent ensuite de pousser à la lumière. Notons qu’en fouillant/creusant délicatement autour des pieds, il est possible de récolter dès le mois de mai quelques pommes de terre, en fonction des besoins – il suffit ensuite de bien reboucher, les plantes continuant de pousser et de produire des nouveaux tubercules, tandis que les plus anciens continuent de grossir.

Fin septembre, alors que toutes les tiges ont séché avant de disparaître, nous procédons à la dernière récolte. Nous ouvrons le bac à l’une de ses extrémités, simplement en enlevant les trois hauteurs de deux parpaings. On découvre alors que le broyat s’est transformé en une terre très sombre, presque noire, sur une trentaine de centimètres d’épaisseur, tandis que la partie supérieure poursuit cette même transformation. Nous disposons alors sur le sol les six parpaings ainsi récupérés, dans le prolongement de ceux qui sont encore en place – en somme nous rallongeons le bac. Parfois, faute de place, nous ne construisons pas le nouveau bac dans le prolongement de l’ancien, mais perpendiculairement, à partir de deux parpaings prélevés sur la longueur – l’ensemble esquisse alors un L voire un T. A l’aide d’un râteau, nous émiettons la paroi de terre dégagée avant de la ratisser, pour commencer à remplir la rallonge. Et là, miracle ! Les pommes de terre dégringolent à leur tour avec la terre, par dizaines, de toutes les tailles : des énormes aussi bien que des toutes petites ! Il suffit alors de les ramasser. À mesure que le bac d’origine est vidé et démonté, un bac identique est construit et rempli dans son prolongement. Quand toute la terre a été émiettée et déplacée, nous refermons l’extrémité du nouveau bac.

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Au cours de l’hiver, nous continuons de nourrir la terre qu’il contient avec du broyat, puis avec une couche finale de compost. Au printemps, nous creusons dans ce compost des petits trous et y déposons trois à cinq graines de haricots, ce que l’on appelle des « poquets ». Et entre ces poquets – que nous repérons avec des petits morceaux de bois – nous plantons des plants de salade, tandis que nous déposons des graines de radis tout au long des parpaings. Salades et radis seront récoltés avant que les haricots ne poussent. Dans le même temps, nous commençons la construction d’un nouveau bac pour la prochaine plantation de pommes de terre.

Ultime précision, les haricots ayant la particularité d’enrichir la terre en azote, leur bac sera laissé tel que en fin de récolte, tout juste ajouterons-nous peut-être un peu de broyat pour refaire son niveau, et nous pourrons y cultiver l’année suivante des plantes gourmandes en nutriments.

Dans notre jardin, tout bouge tout le temps et chaque nouvelle année est l’occasion de nouvelles expériences. Nous ne travaillons jamais la terre – au sens traditionnel du terme – mais nous « laissons faire » et n’apportons pour seule nourriture que du broyat et du compost. Et bien sûr, nous n’arrosons quasiment jamais. Les parpaings étant réutilisables à l’infini et simplement superposés, sans aucune sorte de mortier, notre jardin a une empreinte écologique strictement égale à zéro. Idéal, en somme !

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