À l’occasion des dix ans des Razzies dans Bifrost, le blog vous invite à redécouvrir les toutes premières éditions du prix du pire, parues en un autre millénaire dans la défunte anthologie périodique Étoiles Vives. Après les Razzies 98, voici donc les Razzies 99, sous la plume caustique de Philippe Boulier (avant son exil orbital) dans Étoiles Vives n°8. Et on s'amuse et on rigole…
Nombre d'entre
vous, amis lecteurs, se sont plaints après la publication l'an dernier des
Razzies de la SF, jugeant les propos du responsable de l'époque fielleux,
cruels et de mauvais goût. Vous aviez évidemment raison. Rassurez-vous, le
coupable, qui bien entendu n'est plus notre ami, a depuis été dûment châtié et
croupit actuellement dans le placard d'un micro-éditeur parisien où, paraît-il,
il dirigerait une soi-disant collection dont j'ignore tout. Bien fait pour lui.
Or donc, les
choses étant rentré dans l'ordre, c'est sous le signe du bon goût, de
l'élégance et de la franche camaraderie que s'ouvrent à présent les…
Razzies Nineteen
Ninety Nine
Le prix du pire roman francophone est
remporté haut la main par l'hallucinant Le Père de nos pères de Bernard Werber
(Albin Michel), dans lequel l'auteur, entre deux théories fumeuses sur le
pouvoir des nombres ou la religion, imagine que l'homme descend non du singe
mais du porc. Une chose est sûre : Werber écrit comme un cochon.
Le prix du pire roman étranger récompense
cette année Mutations de Robert J. Sawyer (J'ai Lu Millénaires), ragougnasse
utilisant les cordes les plus usées du thriller scientifique, tendance best‑sellers:
des héros tellement héroïques, des méchants tellement méchants, des rebondissements
tellement prévisibles, et des hectolitres de bons sentiments sirupeux. Blurp…
Le prix de la pire nouvelle francophone va
à La Nuit des petits hommes verts de David Camus (in Galaxies n°11), nouvelle
humoristique pas drôle, écrite dans une langue ressemblant au français sans en
être tout à fait. La faute incombe moins à l'auteur, dont c'est le premier
texte publié, qu'aux responsables de la fiction francophone de la revue, qui
n'ont visiblement pas fait leur boulot. D'autant plus impardonnable lorsqu'on
constate que depuis plus d'un an, Galaxies nous a proposé une sélection
anglo-saxonne irréprochable. On aimerait la même rigueur dans le choix des
fictions francophones.
Le prix de la pire nouvelle étrangère
revient à Nicoletta Vallorani et son Choukra (in Fragments d'un miroir brisé,
Payot SF). On trouve dans cette antho plusieurs textes nuls, n'entretenant
souvent que de lointains rapports avec la science‑fiction, mais cette histoire
d'amour humano-extraterrestre sur fond de génocide planétaire tient le pompon.
Prétentieux, mortellement sérieux, et au final risible.
Le prix de la pire couverture de SF est
sans doute l'un des plus difficile à décerner, tant les candidats sont
nombreux. C'est pourquoi mon choix s'est porté cette année sur la femme-bombardier
d'Hubert de Lartigue, illustrant la couverture de Galaxies n°12 et l'affiche
des Galaxiales 99. Non que le dessin soit laid (je l'avoue, j'aime beaucoup
Lartigue), mais publier et afficher dans les rues de Nancy une telle peinture,
en pleine guerre du Kosovo, voilà qui n'est guère politiquement correct.
Monsieur Jean-Pierre Chevènement se serait déclaré profondément choqué, déçu et
peiné. Je souhaite que de tels débordements bellicistes ne se reproduisent plus
dans l'avenir. Nous aussi, JiPé, nous aussi.
Le prix du pire
article est attribué, pour la deuxième année consécutive, à Henri Loevenbruck
et Alain Névant, pour leur éditorial du numéro 2 de Science-Fiction Magazine,
dans lequel ils développent l'idée que c'est, je cite, « le cinéma
intimiste et d'art et d'essai » qui a tué la science-fiction française.
Reconnaissons leur le mérite de l'originalité et posons-nous cette question :
va-t-il falloir rebaptiser cette récompense « Prix Nevbruck » ?
Le prix Putassier 99 qui, rappelons-le,
récompense la publication d'un texte sans intérêt signé d'un nom connu, dans le
seul but de coller à l'actualité, s'est joué à un cheveu. Étaient en lice
Galaxies et Bifrost, les premiers pour la médiocre nouvelle de Valério
Evangelisti, Metallica (in Galaxies n°11), les seconds pour celle, guère
meilleure, de Robert Silverberg, Jusqu'à ce que la mort nous sépare (Bifrost
n°13). C'est finalement Olivier Girard qui reçoit cette récompense tant
convoitée, puisqu'au moment où Evangelisti et Silverberg participaient aux Galaxiales,
Bifrost était encore chez l'imprimeur! Caramba, encore raté !
Last but not
least, le Grand Master Award (ex-prix spécial du jury) honore cette année Jean-Claude
Dunyach en rose fluo. Aucun des participants à la dernière Convention de SF (à
Lodève) ne s'est tout à fait remis de l'affligeant spectacle auquel il a
assisté lors du banquet final, à savoir le strip-tease de Jean-Claude Dunyach,
le corps entièrement peint en rose fluorescent. Pour sa défense, celui-ci
aurait affirmé qu'il n'était pas à demi-nu, mais simplement déguisé en
AnimalVille. Ce à quoi Ayerdhal, co-auteur avec le susnommé d'Étoiles
mourantes, aurait répondu qu'il préférait être aveugle plutôt que de voir ça,
avant de se planter un stylo-bille dans les orbites. Nos condoléances aux
familles.