Razzies 2002

Razzies |

Les lecteurs de la revue Bifrost le savent, chaque premier numéro de l'année est l'occasion d'une cérémonie un peu particulière... Les Razzies célèbrent à chaque nouvelle cuvée le pire, le plus exécrable, le plus médiocre, le plus improbable de ce qui s'est fait l'année précédente dans notre domaine. Comme le dit maître de cérémonie, « les Razzies se veulent subjectifs, bêtes, d'une mauvaise foi plus qu'occasionnelle et volontiers méchants », le tout avec bonne humeur et dans une ambiance toujours décontractée. Mais attention, toi là-bas, toi que je vois ricaner dans le fond de la salle : peut-être qu'un jour, toi aussi, tu seras dans les Razzies...

(parution initiale in Bifrost n°25 - février 2002)

Tout le monde va en prendre plein la gueule !

Souvenez-vous... Nous avions lancé les Razzies en 1998 dans l’anthologie périodique Etoiles Vives. Trois ans plus tard, alors qu’Etoiles Vives jette l’éponge, ils débarquent dans Bifrost. De fait, une petite mise au point s’impose. Car après tout, que sont les Razzies ? C’est simple : un anti-prix. Les Razzies sont nés aux USA en réaction aux Oscars hollywoodiens. Tous les ans, ils récompensent le film le plus nul, l’actrice la plus mauvaise, le comédien le plus ringard, etc. D’où l’idée, avec le secret espoir d’élargir le cercle de nos amis, de décerner nos Razzies à nous, ceux des littératures de genre, bien sûr. Ainsi, désormais, dans chaque Bifrost de début d’année, vous découvrirez notre sélection des pires hérésies, manques de goût flagrants et faux pas des différents artisans de l'imaginaire en France — éditeurs, auteurs, illustrateurs, traducteurs. Subversifs, subjectifs, bêtes et méchants, les Razzies n'ont qu'un seul but : vous faire sourire (et accessoirement provoquer des débats houleux au sein de la rédaction). Dernière précision : nos choix prennent et prendront toujours en compte l’aura et/ou l’aspect événementiel qui entoure le lauréat. En d’autres termes, les Razzies ne sont pas uniquement motivés par la qualité intrinsèque des textes et œuvres en compétition, mais aussi par le contexte de leur publication...

Et on s’amuse, et on rigole ! 

  • Cela faisait des années que l'on n’entendait plus trop parler de Serge Lehman, et cela faisait encore plus de temps que le susnommé n'avait pas eu de prix. Dans sa grande mansuétude, Bifrost accorde donc le Prix de la pire nouvelle francophone à « Magma » (in Eros Millénium, J'ai Lu). Un texte inepte narrant une fiesta sur un yacht gigantesque, l'Olympe. A moins qu'il ne s'agisse d'une sorte d'hommage à Malpertuis, que l'humble équipe de votre revue préférée n'a pas su décrypter même en consultant régulièrement son Cryptonomicon plaqué strass. Un texte dont l'intérêt sociologique principal est de nous apprendre que dans le futur proche les riches partouzent, consomment de la cocaïne et ne sont peut-être pas heureux. De quoi révolutionner toute la philosophie moderne ! Pour le retour de cet auteur qu’on a connu formidable, nous étions en droit d’espérer mieux, bien mieux. 
  • Le Razzy de la pire nouvelle étrangère est remporté par « Une visite chez mère-grand » de Clifford D. Simak (in Bifrost n°22), pour son caractère totalement inutile et son insupportable mièvrerie. Un texte qui aurait grandement mérité de rester dans le carton poussiéreux dont on l'a tiré. Surtout : ne lisez pas ce texte ! Vous risqueriez ensuite d'assassiner toute personne de plus de soixante-neuf ans que vous surprendriez à faire de la compote de pommes. 
  • Le Prix du pire roman étranger est attribué à La Maison Harkonnen de Kevin J. Anderson et Brian Herbert (Robert Laffont, « Ailleurs & Demain »). Pour en savoir plus, le mieux est encore de lire la critique dans Bifrost n°23 : l’essentiel y est dit. 
  • Le Prix du pire roman francophone est attribué à Jacques Sadoul pour l’inénarrable Chronique des dragons oubliés aux éditions Flammarion, ouvrage de fantasy (?) qui a permis à Elric, Conan et Aragorn de se fixer un but commun : mettre à feu et à sang le siège de l’éditeur. Autodafé prévu pour la sortie du second opus... 
  • Le Prix du pire article devait être remis à Science-Fiction Magazine pour l'ensemble de son œuvre. Mais comme ils l'ont déjà eu deux fois (durant la période Névant-Lœvenbruck) et qu'on ne retrouvait plus les exemplaires de l'année 2001, probablement bouffés par notre mascotte, Patou, c'est Daniel Conrad qui le remporte haut la main avec sa critique du Bifrost spécial Clifford D. Simak dans leGalaxies n°22. Une critique où l'on apprend que l'auteur de Demain les chiens n'a jamais transcendé — à quelques exceptions près — monsieur Conrad. Et le café, Daniel, tu l'aimes avec un ou deux sucres ? 
  • Prix de la pire couverture. Sans aucun doute la catégorie la plus disputée au vu du nombre de postulants, d'autant plus qu'il semblait impossible cette année de départager les immondes couvertures « Folio-SF », dont Les Maîtres-chanteurs est un summum, des tout aussi immondes illustrations de Jackie Paternoster (« Ailleurs & Demain », et Le Livre de poche), sans parler des perles horrifiques de la collection « Imagine » chez Flammarion. Heureusement, fin octobre, Stéphane Nicot était là pour nous sauver de ce dilemme et empêcher une dame d'avoir le prix… Avec Imaginaire Sans Frontières, et notamment avec l'ouvrage du couple Belmas, l'illustration en France a atteint une sorte de nirvana du caca-boudin pelliculé gomina qui laisse sans voix. Bravo Stéphane, ta galanterie te sauvera ! 
  • Le Prix de la pire traduction est remis cette année aux éditions J'ai Lu pour leur sabotage amoureux des ouvrages de Nalo Hopkinson, La Ronde des esprits, et de Neil Gaiman, Stardust, traduits avec une incompétence qui nous permet de rappeler que la restauration française manque cruellement de personnel. Beuuurk ! 
  • Le Prix Putassier 2002 est remis à l'unanimité, et plus encore (Gandalf vient d'appeler…), aux éditions Bragelonne pour la publication ô combien éclairée de Lord of the ringards, parodie inutile, scatologique et douteuse du Seigneur des Anneaux
  • Cette année, le Grand Master Award est remis aux Grotesques Organisateurs du festival Utopiales. D'abord pour avoir séparé le public de ses auteurs avec un bar VIP et des badges de différentes couleurs qui nous rappelaient la grande époque (hélas révolue) des camps de rééducation maoïstes. Et surtout pour nous avoir permis de voir Gardner Dozois errer dans l'espace librairie du festival, à la recherche d'une place pour dédicacer alors que ses livres se trouvaient empilés par terre (!) dans un coin. Comme les G.O. des Utopiales oublieront probablement de s'excuser auprès de ce grand auteur américain, c'est toute l'équipe de Bifrost qui s'y colle. Navrant. 

C'est tout pour cette fois. Rendez-vous dans un an pour un nouvel élargissement amical !

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