Chaque fois que je me balade dans une jardinerie, au rayon des conifères, une formule populaire me revient en mémoire : "droit comme un if". Dans mon enfance, je l’entendais utilisée à propos des vieillards dynamiques en dépit de leur âge (dans les années soixante, la vieillesse commençait à 60 ans… ce qui me laisse moins de trois ans de jeunesse, dur).
Journal d'un homme des bois, 6-7 avril 2013
Samedi 6 avril 2013
Diner familial, à Bordeaux. Quelqu’un nous dit avoir pris la décision de se rendre dans l’un des centres Zen de Bordeaux, pour y apprendre des techniques de méditation. Chouette. Il y a plus d’un an, j’avais suggéré à cette personne d’essayer cette pratique, dans un contexte purement laïc, en la considérant simplement comme une technique susceptible de l’aider à mieux-vivre – il faut laisser le temps au temps ; et la vie se charge de nous envoyer des signes quand vient l’heure des choix. On n’est absolument pas obligé d’adhérer à l’enseignement du Bouddha pour se mettre à méditer !
Dimanche 7 avril 2013
Acheté un Cupressus sempervirens 'Totem' au Jardiland du coin. Connu sous le nom de Cyprès d’Italie ou Cyprès de Provence, c’est un conifère très étroit qui pousse en forme de grande colonne (jusqu’à 30 mètres) et vit très longtemps (au moins 500 ans). On en voit plein dans le sud de la France et en Italie – en particulier en Toscane, terre d’origine de l’un de mes arrière-grands-pères, petit dernier d’une immense fratrie nobiliaire et ruinée, du nom de Di Valeri, venu en France à la fin du XIX° siècle. Chaque fois que je me balade dans une jardinerie, au rayon des conifères, une formule populaire me revient en mémoire : "droit comme un if". Dans mon enfance, je l’entendais utilisée à propos des vieillards dynamiques en dépit de leur âge (dans les années soixante, la vieillesse commençait à 60 ans… ce qui me laisse moins de trois ans de jeunesse, dur). On disait aussi "bon pied bon œil", "encore vert" ou "pétant la santé". Bref. Sur la foi de cette formule – "droit comme un if" – j’ai longtemps pensé que ces conifères bien verts et bien droits, que l’on voit un peu partout, étaient donc des ifs. Jusqu’au jour, déjà lointain, où j’ai compris qu’il s’agissait, en réalité, de cyprès ! Car l’if ancien a une silhouette un rien bordélique, un tronc très large et ramifié, souvent creux, avec des branches qui partent dans tous les sens – on en voit des vraiment vieux dans les cimetières de campagne. C’est le cyprès qui est tout droit et tout raide, et pète la santé comme un septuagénaire priapique, et long comme un jour sans pain – ou le contraire. Pas l’if. Comme quoi, ma bonne dame… Acheté aussi un petit Physalis.