Rock'n'write : Fabrice Colin

Rencontres |

rocknwrite-colin-une.jpgAprès son compère David Calvo, voici le tour de Fabrice Colin de se plier au jeu du questionnaire musical. Et n'oublions pas que, en attendant la parution du Bifrost 69, il est toujours possible de se replonger dans Big Fan, son roman centré autour du groupe le plus important du tournant des années 2000, Radiohead.

Peux-tu nous parler de tes goûts musicaux ? Les groupes/musiciens que tu aimes, ceux que tu aimes détester, et ce qui n’accroche pas du tout à ton oreille.

Disons que je suis curieux de tout à l’exception du metal, de la plupart des trucs de rap et du rock dit progressif.

Je n’ai pas une relation très intellectuelle à la musique. C’est si facile de faire le malin avec ça, de sortir des groupes que personne ne connaît ; j’ai cessé de croire que ça signifiait quoi que ce soit, si ce n’est qu’on a du temps libre.

J’ai été biberonné aux Inrocks première mouture – le bimestriel noir et blanc de la fin des années 80 – et je suis resté très fan de ce qu’à l’époque, et quand ça avait encore vaguement un sens, on appelait rock indépendant.

J’ai eu plusieurs « groupes préférés » : les Pixies, les Boo Radleys, les Flaming Lips, Radiohead.

Aujourd’hui, je professe une grande tendresse pour, par exemple, Nina Simone, Roy Orbison ou les Beatles, ou, plus près de nous, Damon Albarn ou The National. Je n’aime rien tant, par ailleurs, que découvrir (ou faire découvrir) des trésors cachés présents et passés, genre Virginia Astley ou The Left Banke. Le paysage est sans limite.

Lorsque tu écris, est-ce en silence ou avec de la musique comme bande-son ? Si oui, quel genre ?

J’écris généralement en silence, la musique me dérange mais il arrive que, pour certaines scènes de certains livres, je puisse écouter certains disques. C’est une affaire de compatibilité chimique plutôt mystérieuse. La B.O. de There will be blood, par exemple, ne me gêne nullement, je peux l’écouter cent fois. Même chose avec le Moon Safari de Air ou certains albums de Can.

Je ne saurais pas expliquer ce qui est à l’œuvre ici.

rocknwrite-colin-therewillbeblood.jpgrocknwrite-colin-moonsafari.jpg

Inversement, conseillerais-tu une playlist pour tes romans ?

Non, et les bouquins dans lesquels l’auteur nous explique qu’il a écouté tel ou tel album en écrivant et nous incite à faire la même chose me font plutôt marrer. On pourrait aussi raconter ce qu’on a bouffé, tant qu’on y est.

Joues-tu d’un instrument de musique ? Si oui, lequel ?

J’ai joué du piano pendant sept ou huit ans. J’étais très mauvais, c’était un vrai calvaire –même pas un regret.

Souvent, je fais ce rêve bizarre et très américain où je dois remplacer au pied levé un guitariste dans un concert de fête de lycée. Je ne sais pas jouer de la guitare mais bizarrement, ça passe.

En 2010, tu as consacré un roman à Radiohead,Big Fan. Pourquoi ce groupe entre tous ?

rocknwrite-colin-bigfan.jpg

J’ai découvert Radiohead avec Creep et je reste fasciné par l’évolution de ce groupe qui a, quoi qu’on en dise, toujours réussi à se réinventer. Ces types sont des aventuriers. Bien sûr, tout n’est pas parfait chez eux, mais j’ai beaucoup de respect pour leur parcours et sur les vingt années écoulées, je ne vois pas qui peut leur tenir tête.

Par ailleurs, le public de Radiohead est particulièrement fidèle et exigeant, un vrai réservoir à psychopathes éclairés — exactement ce dont j’avais besoin pour écrire un livre.

Est-ce qu’il y un autre groupe ou musicien sur lequel tu serais tenté d’écrire ?

Quelqu'un de mort, forcément, et qui ne soit pas John Lennon. Syd Barrett ? Mais David Calvo ferait sans doute ça mieux que moi. Frank Zappa ? Ah non, Pacôme Thiellement serait bien plus indiqué pour l'exercice. Arthur Lee de Love, alors. C'était un génie, et il a fait de la prison.

rocknwrite-colin-tkol.jpgQue penses-tu du dernier album en date du groupe, The King of Limbs ? D’aucuns l’ont trouvé assez décevant.

Ce n’est pas le meilleur, tous les fans sont d’accord là-dessus — je le trouve paradoxalement trop produit et un peu court. Mais si on lui adjoint Supercollider sorti un peu après, ça devient un album tout à fait honnête, du niveau, disons, de Hail to the thief. Lotus Flower et Separator sont deux très beaux morceaux, dignes de figurer sur In Rainbows, le meilleur album du groupe à mes yeux. En fait, la version From the basement jouée live est beaucoup plus intéressante.

rocknwrite-colin-supercollider.jpg

Seulement Supercollider ? Les titres hors-album parus avant ou après The King of Limbs (These are my twisted words, The Daily Mail/Staircase) auraient peut-être mérités de figurer aussi sur le disque, non ?

Tu as parfaitement raison, même si Staircase ne me transporte pas complètement. Tant qu'à faire, on pourrait aussi citer, back in 2009, une reprise de Miracle Legion signée Thom Yorke (son frère chante aussi), dotée d'un clip tout à fait envoûtant.

Enfin, quel album figure au sommet de ton panthéon personnel ?

Pour moi, un grand album, c’est un disque où il n’y a que deux ou trois chansons dont on peut se passer.

Dans un chef-d’œuvre, il y en a une seule, ou pas du tout : Revolver, Forever Changes, Sign ☮ the times, etc. Ces derniers temps, je pense au Funeral de Arcade Fire et à The Soft Bulletin des Flaming Lips.

rocknwrite-colin-funeral.jpg

Haut de page