Dernière journée à Bruxelles. Ballade à l’ancien jardin botanique, sur la commune de Saint-Josse. Construit à partir de 1826, l’ensemble a été inauguré en 1829, un an avant l’accession à l’indépendance de la Belgique – alors sous domination néerlandaise. Pour la petite histoire, c’est dans les caves de son orangerie que fut "inventé" le chicon, pousse blanchie obtenue par forçage de l’endive.
Journal d'un homme des bois, 29 mars 2012
Dernière journée à Bruxelles. Ballade à l’ancien jardin botanique, sur la commune de Saint-Josse. Construit à partir de 1826, l’ensemble a été inauguré en 1829, un an avant l’accession à l’indépendance de la Belgique – alors sous domination néerlandaise. Pour la petite histoire, c’est dans les caves de son orangerie que fut "inventé" le chicon, pousse blanchie obtenue par forçage de l’endive. En 1870, l’état rachète les lieux à la Société horticole qui en assurait l’exploitation. A la fin du dix-neuvième siècle, cinquante-deux œuvres sont commandées aux meilleurs sculpteurs de l’époque, illustrant la faune, la flore, les saisons…
Le jardin botanique se double alors d’une véritable galerie d’art à ciel ouvert – Paul Du Bois compte au nombre des artistes ayant fait l’objet d’une commande. Hélas, en 1935 des grands travaux d’aménagement routier entraînent le démontage des serres et le déplacement des plantes d’extérieur – il reste aujourd’hui une partie des sculptures, quelques arbres centenaires remarquables, ainsi que l’ancienne orangerie avec sa belle rotonde et ses deux ailes, sauvée in extremis de l’abandon pur et simple par l’intervention des autorités de la communauté française de Belgique – ce très beau bâtiment est devenu un centre culturel. Aujourd’hui, une de ces saloperies d’autoroutes urbaines passe au pied des derniers arbres – impossible, bien entendu, d’échapper au grondement épouvantable d’un trafic continu. Et comme si cela n’avait pas suffi à dénaturer les lieux, ce qui subsiste du vieux parc est désormais encerclé par des monstruosités en béton qui masquent l’horizon et bouffent le ciel. Il y a un mot ici pour qualifier les ravages de cette "modernisation" calamiteuse : la bruxellisation.
En fin de matinée, nous allons faire un tour au Centre Belge de la Bande Dessinée, rue des Sables. Inauguré en 1989 et supposé abriter la plus grande collection de BD au monde – mais la bibliothèque de Lausanne dit la même chose… – le CBBD a été installé dans ce qui était alors l’épave du grand magasin de tissus Wauckez, construit en 1906 par Victor Horta, le géant de l’Art Nouveau. Ce bâtiment somptueux, magnifiquement restauré, est le dernier et unique témoignage de la quinzaine de grands magasins du maître. Là encore, des forcenés les ont condamnés au nom d’une certaine idée de la "modernité". Pauvres sots ! Horta, lui, était Moderne ! Toujours ce curieux contraste, dans une ville qui est à la fois la plus belle du monde et la plus massacrée. Nous déjeunons au restaurant du rez-de-chaussée. Comme presque toujours en Belgique, le service est courtois et diligent, la nourriture bonne et copieuse, les prix tout à fait corrects. Demain, notre train démarre à l’aube. Destination Bordeaux. A tout bientôt, Bruxelles ! Tu vas nous manquer…