Bâtir le Dernier Château : rencontre avec Pierre-Paul Durastanti

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batir-dernier-chateau-une.jpgLe Dernier Château et autres crimes, recueil de quatre novellas de Jack Vance, est dans toutes les bonnes librairies terriennes depuis le 14 mars. À cette occasion, Pierre-Paul Durastanti, maître d’œuvre de ce recueil, nous dit tout, du choix des textes jusqu’aux prochains projets vancéens…

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Le dernier recueil de Jack Vance, Sjambak, remonte à sept ans. Pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant un nouveau livre de l’auteur. Bref, comment a germé l’idée de ce projet d’omnibus ?

Je fonctionne un peu par « cycles » pour ce que je propose à Olivier Girard. Après le cycle Vance, il y a eu le cycle Poul Anderson, le cycle Simak en cours… Là, c’est tout simplement l’occasion d’une relecture pour le plaisir des Maisons d’Iszm dans la langue d’origine qui m’a permis de réévaluer ce texte, dont je ne gardais qu’un vague souvenir qui remontait à mon adolescence, et poussé à lui redonner vie.

Qu’est-ce qui a présidé au choix des textes ?

Je trouve Vance au sommet de son art lorsqu’il écrit des novellas. L’idée était de proposer de longs récits (qui approchent ici les dimensions du roman, dans deux cas sur quatre) sur une base thématique commune assez lâche, dans le genre de Croisades. J’étais parti sur l’écologie en tant que dénominateur commun, mais j’ai ensuite décidé d’inclure « Alice et la cité » dans le sommaire, et j’ai alors constaté que le crime — au sens large — pouvait servir de liant.

Jack Vance a également écrit une douzaine de polars. Y trouve-t-on une parenté avec ses œuvres de science-fiction ? En particulier dans Le Dernier Château ?

Il y a beaucoup de textes hybrides dans sa science-fiction, comme je le rappelle en préface. Le pendant polar se caractérise plutôt par une parenté dans le ton, dans l’iconoclastie de certains personnages. Notable exception : Méchant garçon, qui inclut des passages reconnaissables (et justifiés) de « l’autre » Vance, celui qui écrit des œuvres non-mimétiques. Il y a un bon motif à cette transversalité, mais je ne dirai pas lequel. Il faut lire ce livre, un de ses meilleurs à mon goût. (Je ne suis d’ailleurs pas le seul à le penser ; c’est François Guérif, légendaire éditeur de polar, qui l’a fait traduire dans sa collection séminale, « Red label ». Ajoutons que ce bouquin a été réédité à diverses reprises chez nous et adapté deux fois à l’écran…)

Toi et Olivier Girard avez ravaudé les traductions des textes du Dernier Château. Était-ce « cosmétique » ou bien une nécessité ?

Ça variait. Une traduction assez récente d’un type doué comme Jean-Pierre Pugi ne demande pas le même travail que d’autres. Si tu sous-entends par « nécessité » le besoin de compléter les textes, non, ils étaient intégraux. Mais sur le plan, disons, esthétique plus que cosmétique, oui, il fallait revoir les versions françaises. Et parfois en profondeur.

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batir-dernier-chateau-livredor.jpgLa novella « Le Dernier Château » est l’unique texte de Jack Vance doublement primé (Nebula 66 et Hugo 67). De manière générale et au vu de la quantité de son œuvre, Vance est étonnamment peu primé. Vois-tu une raison à cela ?

Le ton, je pense. Son cynisme passe peut-être mieux auprès d’Européens un peu blasés dans notre genre ? J’avoue que je m’interroge là-dessus, moi aussi. Par contre, il a eu des prix de SF, de fantasy et de polar, un bel éventail, et sur 30 ans, une longévité certaine.

Y a-t-il d’autres projets vancéens prévus au Bélial’ ? Reste-t-il d’ailleurs des inédits ?

Il en reste, dont certains que je dois d’ailleurs me procurer. Je parle de nouvelles, là. Le seul roman de SF inédit chez nous, son premier, était destiné à un public jeune ; on n’est pas tous vieux, et nos lecteurs non plus, mais j’avoue que je vois mal ça au Bélial’ dans l’état actuel de mes réflexions. Par contre, je peux annoncer que je prévois un volume de deux novellas déjà traduites, mais jamais réunies en France sous une même couverture, des polars qui mettent en scène Miro Hetzel, un enquêteur des étoiles. C’est du Vance archétypal des années 70, d’une écriture léchée et d’un exotisme ébouriffant. Bref : du pur bonheur !

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Jack Vance a également publié en 2010 son autobiographie : This Is Me, Jack Vance! Est-ce quelque chose que l’on pourrait voir au Bélial’ ?

Je l’ai lue. Il y a des passages intéressants, mais j’attendais un livre plus orienté sur la carrière du vieux maître. A priori, donc : non, pas pour nous.

Enfin, on me chuchote à l’oreillette que tu traduis l’une des nouvelles au sommaire de Songs of the Dying Earth, l’anthologie-hommage à Vance prévue chez ActuSF. Peux-tu nous en dire plus ?

Deux mots : Robert Silverberg. Allez, deux de plus : la classe !

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