K comme Killer Klowns from outer space

L'Abécédaire |

Les clowns ? Même pas peur. Même lorsqu'il s'agit d'envahisseurs extraterrestres venus récolter les humains d'une paisible bourgade américaine pour les transformer en barbapapa, comme ceux de l'inénarrable Killer Klowns from outer space, sympathique série Z au statut culte…

Les Clowns tueurs venus d’ailleurs [Killer Klowns from Outer Space], Stephen Chiodo (1988). Couleurs, 82 minutes.

Alors que l’affreux Pennywise/Grippe-sou imaginé par Stephen King est revenu hanter les écrans de cinéma un peu plus tôt cet automne, il est bon de se rappeler qu’il n’est pas le seul clown extraterrestre à avoir flanqué la trouille dans une petite ville tranquille.

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C’est un vendredi soir normal dans la paisible bourgade de Crescent Cove : les amoureux se bécotent dans leurs véhicules, sur les rives du lac ; les vendeurs de glace incompétents du coin tentent de fourguer leur camelote ; les deux flics se préparent à passer une soirée peinarde à ramasser les voyous habituels. Soudain, un objet volant lumineux traverse le ciel. Ce n’est pas un oiseau, ce n’est pas un avion, ce n’est pas non plus la comète de Halley. Lorsque le vieux Gene Green se rend avec son chien sur les lieux du supposé impact, quelle n’est pas sa surprise de découvrir, en lieu et place d’un cratère fumant, un… chapiteau de cirque. Un peu surpris, le vieillard examine, avant de se faire capturer, en compagnie de son cabot, par un clown un tantinet inquiétant. Un peu plus tard, Mike et sa petite amie Debbie arrivent sur les lieux.

« On dirait vraiment que ça a été décoré par un magasin de jouets », s’exclame Mike quand Debbie et lui s’aventurent dans l’étrange chapiteau. De fait, l’intérieur s’avère excessivement coloré. Mais la joie des deux tourtereaux cède la place à la terreur quand ils se rendent compte que les énormes masses de barbapapa ne sont autres que des cocons abritant des corps humains – notamment celui du vieux Gene Green. En tentant de fuir, ils sont repérés par les occupants du chapiteau – des clowns, naturellement –, qui se lancent à leur poursuite avec cette arme improbable : un fusil à popcorn.

« Du popcorn ? Mais pourquoi du popcorn ?
– Parce que ce sont des clowns ! »

Nos jeunes héros le comprennent vite : ces clowns venus d’ailleurs se nourrissent d’êtres humains. Et l’heure de la récolte a sonné à Crescent Cove. Mais pour Mike et Debbie, il va d’abord falloir prévenir les forces de l’ordre – représentées par l’officier Dave, ex de Debbie, et son supérieur obtus Mooney… Mais n'est-il pas déjà trop tard ?

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Film de série Z, Les Clowns tueurs venus d’ailleurs dépasse sa prémisse idiote pour proposer un divertissement certes idiot mais totalement assumé. Les frères Chiodo, dont il s’agit du premier et unique film, se donnent à fond. En soi, le film tient d’ailleurs plutôt bien la route et se regarde avec un amusement certain. Surtout, ce délire a bien supporté l'épreuve des ans. Pas de problème de rythme (la durée assez brève du long-métrage y est pour quelque chose), rares problème de montage, un budget certes limité mais qui ne se remarque pas trop – à l’exception des scènes finales dans le vaisseau-chapiteau –, des acteurs jouant correctement leur rôle. (Côté doublage français, c’est la fête du slip, en particulier avec le personnage de Gene Green.) Le point fort du film provient de ses trucages, surtout celui des clowns – gentiment creepy, avec leurs trognes disproportionnées en latex. Rien d’étonnant à savoir que la fratrie Chiodo – Stephen, Charles et Edward – a continué à travailler dans le domaine des effets spéciaux, avec une spécialisation en animation et marionnettes.

Autre point fort du film : son générique, porté par l’excellente chanson « Killer Klowns From Outer Space » du groupe californien The Dickies, issue de l’EP éponyme. Impossible de résister à cette pépite pop-punk et son riff ravageur.

La coulrophobie, terme assez peu explicite en soi, désigne la peur des clowns. Et parmi les choses que je n’ai jamais trop comprises, au même rang que l’existences des yaourts aromatisés à la banane, c’est bien la phobie des clowns — au-delà du seul aspect « truc censément inoffensif détourné de sa fonction première pour faire peur et induire un malaise du fait de ce décalage ». Pourquoi les clowns et pas les Pierrots lunaires ou les mimes Marceau ? Certes, un clown est (souvent) moche et ne fait pas vraiment rire, mais de là à flipper… Certes, les phobies, ça ne s’explique pas. Et le tueur en série John Wayne Gacy tout comme Ça de Stephen King ont probablement aidé à la cristallisation de cette phobie. Depuis, les œuvres mettant en scène des clowns tueurs ont fait florès – effet qui fonctionne aussi avec les poupées, les gamins, et, grosso modo, toute chose supposée gentille et inoffensive.

On retrouve dans Les Clowns tueurs venus d’ailleurs quelques liens avec le roman-culte de King, sorti deux ans plus tôt : le titre ne ment pas à son sujet, ici aussi les clowns sont des extraterrestres. Mais là où la maléfique créature de King adopte l’apparence susceptible d’infliger le maximum de peur à qui la voit – son aspect de clown semble son apparence par défaut –, les clowns du film de Stephen Chiodo sont de simples aliens. D’ailleurs, il pourrait être intéressant d’imaginer le processus évolutionnaire ayant mené à l’apparition de semblables extraterrestres sur quelque exoplanète lointaine. Le film ne donne pas d’explication mais a le mérite d’être cohérent : les clowns utilisent des armes clownesques (une massue démesurée et colorée, par exemple), ont des fusils à popcorn, se servent de chiens en ballons de baudruche… et leur point faible s’avère leur gros nez rouge. Mine de rien, c’est terriblement logique. La question se pose donc : et si les clowns humains n’étaient que des représentations édulcorées de ces affreuses créatures extraterrestres ?

Une potentielle suite, The Return of the Killer Klowns from outer space in 3D, est dans les tuyaux depuis des années, sans rien de concret à l’horizon. Est-ce vraiment nécessaire ? En soi, cette série Z, qui mérite amplement son statut culte, se suffit à elle-même – de préférence entre potes, avec des bières et des pizzas.

Introuvable : non
Irregardable : non
Inoubliable : tellement

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