Star Trek : dans le doute, reboote (3/3)

Cinéma et séries |

En 2002, Star Trek : Némésis semblait sonner le glas de la saga Star Trek – glas entériné par la fin, trois ans plus tard, de Enterprise, dernière série à ce jour sur petit écran… Une saga ronronnante en dépit de ses titres ronflants, et, in fine, tout juste bonne à intéresser un public de vieux fans. Jusqu’à ce que J.J. Abrams, le créateur des séries Alias, Lost, Fringe et le sauveur de la franchise Mission : Impossible, ne soit appointé sur le projet de reboot…

En 2002, Star Trek : Némésis semblait sonner le glas de la saga Star Trek – glas entériné par la fin, trois ans plus tard, de Enterprise, dernière série à ce jour sur petit écran… Une saga ronronnante en dépit de ses titres ronflants, et, in fine, tout juste bonne à intéresser un public de vieux fans. Jusqu’à ce que J.J. Abrams, le créateur des séries Alias, Lost, Fringe et le sauveur de la franchise Mission : Impossible, ne soit appointé sur le projet de reboot…

 

Troisième époque : dans le doute, reboote

 

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Star Trek
J. J. Abrams, 2009

Comment raconter à nouveau la même vieille histoire… si ce n’est en la racontant différemment ?

Origin story , le film débute lorsque l’USS Kelvin est attaqué par un monstrueux vaisseau romulien. Capitaine du vaisseau pendant exactement douze minutes, George Kirk a tout juste le temps de donner un nom à son fils, qui vient de naître à bord d’une navette de sauvetage, avant de jeter le Kelvin contre la nef romulienne. Enfant indiscipliné, James Tiberius Kirk ne s’assagit guère en grandissant. Néanmoins, le capitaine Pike lui donne une chance de s’engager dans Starfleet. Trois ans plus tard, et suite à ses frasques, Kirk n’est pas convié à bord de l’USS Enterprise lorsque celui-ci appareille pour Vulcain avec les autres vaisseaux de la Fédération afin de faire face à une menace inconnue…

Et c’est reparti pour un tour, pas dénué de surprises : on croit connaître l’histoire mais, univers parallèles oblige, celle-ci n’est plus exactement la même. Après les mises en scènes plan-plan des précédents volets de la saga, Abrams nous offre un film faisant preuve d’une jolie fluidité et d’une photographie réussie. Le film marie ombre et lumières avec brio – c’est une orgie de lense flares (mais ce ne serait pas un film de J.J. Abrams sans). Le sense of wonder est indéniablement présent, que ce soit dans les scènes spatiales – l’USS Kelvin face au Narada – ou celles se déroulant sur le plancher des vaches – Kirk filant en moto sur fond de buildings futuristes. Au fil des péripéties, qui s’enchainent sans temps morts, la caméra virevolte d’un personnage à un autre avec maestria, sans jamais donner le tournis.

Tout au plus pourra-t-on regretter quelques coïncidences faciles, et un méchant pas très convaincant. « Je m’appelle Nero, ce qui veut dire "noir" en italien, j’ai des vilains tatouages partout sur le visage et j’habite dans un vaisseau à l’ambiance glauque. » Mouais. Le film paraît lorgner par endroit du côté de Némésis : quelques scènes, notamment celles avec le vaisseau romulien toisant l’Enterprise, ont des airs de clins d’œil ; quant à Nero, il a des faux airs de Shinzon. Des défauts véniels.

Car la moindre des choses à propos de ce Star Trek rebooté – le terme adéquat serait plutôt re-boosté – par J.J. Abrams est l’intense sentiment de jubilation qu’il procure. À ce titre, l’ultime scène est du pur fan service, et c’est exquis. Les personnages cultes sont là, chacun à droit à son quart d’heure de gloire – sans oublier l’émouvant caméo de Leonard Nimoy. Et l’ensemble est porté par une musique au thème majestueux et plein d’entrain.

Bref, un retour en forme.

Verdict : impair et on ne passe pas

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Star Trek into Darkness
J.J. Abrams, 2013

Pour avoir violé la Prime Directive, qui interdit le contact avec les peuplades dites primitives, dans le but de voler au secours de M. Spock, James T. Kirk est rétrogradé au rang de premier officier de l’Amiral Pike. Et les deux hommes ont du pain sur la planche : un ancien officer de Starfleet, un certain John Harrison, veut détruire l’organisation. Après avoir provoqué une explosion dans un centre de recherches secret, il décapite l’élite de Starfleet – ce qui a pour effet de ramener Kirk sur le devant de la scène, avec pour mission de traquer Harrison. Mais (bien entendu) les choses ne sont exactement pas ce qu’elles paraissent.

Du côté des points positifs, Star Trek Into Darkness est d’une très jolie facture. Certes, Abrams abuse de sa marque de fabrique – lenses flare à gogo –, mais les images sont belles, lumineuses, chatoyantes et colorées. Quant à la partition de Michael Giacchino, elle s’intègre bien.

Mais… ce douzième épisode se base sur une fausse bonne idée, à savoir refaire/réinterpréter La Colère de Khan. Pour les trekkies, l’identité du personnage joué par Cumberbatch ne fait jamais le moindre doute et le suspense qui est ménagé autour s’avère inutile. Pour ceux qui n’ont pas vu l’original de 1982 : c’est qui ce Khan ? Certes, et sans grande surprise, Cumberbatch excelle dans le rôle, déployant sa partition habituelle d’individu froid et super intelligent. Du côté des autres personnages, les interactions Kirk/Spock font mouche de nouveau, mais on pourra regretter que les autres membres d’équipage soient délaissés – les deux femmes, Uhura et le Dr Marcus, font pratiquement de la figuration et c’est fort dommage.

Une autre erreur est de centrer essentiellement cet épisode sur la Terre : Star Trek, c’est censément l’espace, la découverte de nouvelles planètes et de nouvelles civilisations… chose qui n’est abordée que lors du prologue et le temps d’une excursion du Kronos, le monde d’origine des Klingons.

Dernière erreur, et pas la moindre : le caractère exagérément sombre de l’intrigue. Trop de sérieux et de sombre finit par peser, et Star Trek n’en a pas besoin. Avec le précédent volet, J.J. Abrams a choisi de dépoussiérer la saga : chose salutaire, mais qui s’est faite au détriment du caractère de la série, qui s’égare en chemin dans ce Into Darkness. Certes, autres temps, autres attentes…

Verdict : pair et on passe (avec quelques regrets)

*

 

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Star Trek Sans Limites
Justin Li, 2016

La fin de Star Trek into Darkness laissait envisager un épisode suivant qui reviendrait au cœur de la saga, à savoir l’exploration de mondes nouveaux lors d’une expédition de cinq ans. Le début de Sans Limites nous plonge en plein dedans, avec Kirk en pleine négociation avec une race alien ; on apprend un peu plus tard que le capitaine a déjà dépassé la moitié de sa mission quinquennale… et qu’il commence à en avoir assez. Après une mission où Kirk échoue à remplir sa mission d’ambassadeur, l’Enterprise fait escale sur la station Yorktown mais en repart bientôt, pour partir secourir l’équipage d’un vaisseau censément en détresse sur une planète perdue au seine d’une nébuleuse non-cartographiée. Mais il s’avère que c’est là un piège, et des essaims de vaisseaux disloquent l’Enterprise : Kirk et les siens doivent s’éjecter, et atterrissent sur cette planète. La plupart sont faits prisonniers par Krall, le tyran local. Kirk va avoir fort à faire pour les délivrer… et neutraliser une menace pesant sur la Fédération.

Visuellement, Star Trek Sans Limites est assez beau… mais moins que le précédent volet. Si la station Yorktown est un décor intéressant, Li oublie d’insuffler pleinement dans les scènes s’y déroulant l’indispensable sense of wonder – il suffirait que certaines scènes d’exposition durent juste un poil plus longtemps. Côté bande originale, Michael Giacchino ne fait cette fois pas vraiment des merveilles, signant une partition assez anecdotique.

Ce treizième épisode reste un rien bancal. Les enjeux de l’intrigue sont un peu moins élevés que dans Into Darkness – ce n’est pas une mauvaise chose en soi –, mais l’histoire peine à passionner, et l’on s’ennuie un peu. Le seul véritable moment d’émotion provient de l’hommage rendu à Leonard Nimoy, décédé alors que le film était en préproduction. Rien d’aussi émouvant hélas pour Anton Yelchin, décédé peu avant la sortie du long-métrage.

Du côté des bons aspects, on retiendra la dynamique des personnages, qui, en choisissant de séparer les protagonistes, amènent à se focaliser sur autre chose que la relation Kirk-Spock. Tandis que Kirk et Chekov se débrouillent autant qu’ils peuvent, McCoy et Spock doivent se supporter… et se soutenir mutuellement ; Scotty fait équipe avec Jaylah ; enfin, Uhura a l’occasion (un peu) de briller face à Krall. (Au passage : adieu le Dr Marcus ? Censément membre à part entière de l’équipage à la fin d’Into Darkness, elle est absent de ce nouveau volet. Espérons que le personnage de Jaylah restera de la partie pour un éventuel quatorzième épisode.) Quant à Idriss Elba, il est mésemployé : prendre un acteur de sa carrure pour n’en faire pas grand-chose à part un méchant lambda ?

L’ensemble forme un épisode sympathique, à défaut d’inoubliable, et qui ne décolle jamais vraiment.

Verdict : impair et on ne passe pas (avec quelques doutes)

*

 

And beyond ?

Si la production de Star Trek Sans Limites a été hâtée pour coller aux cinquante ans de la saga initiée par Gene Roddenberry, l’avenir reste plus flou du côté du grand écran : Chris Pine et Zachary Quinto, interprètes respectifs de Kirk et Spock, ont signé pour un quatrième volet, mais on ne sait rien de plus. D’ici que les choses bougent de ce côté-là, on pourra regarder une nouvelle série télévisée, Discovery, douze ans après la fin de Enterprise. Discovery verra le jour en mai 2017 sur la chaîne américaine CBS, et, à la différence des récents longs-métrages, sera rattachée à l’univers originel.

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